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Razzia de PASTEF aux Législatives : Ousmane Sonko écrase ses adversaires

Ousmane Sonko, en vue de la Présidentielle de mars 2024, a transformé le succès de son parti en un véritable triomphe personnel. Il a cherché à réaffirmer son autorité sur le mouvement et ses orientations, tout en soulignant l’importance des décisions qui influenceront nos vies pour au moins les cinq prochaines années, voire au-delà.

Il est clair que ce triomphe est indiscutable. Les résultats provisoires des élections législatives, publiés hier à la fermeture des bureaux de vote, montrent une victoire écrasante pour le parti dirigé par Ousmane Sonko. Pastef/Les Patriotes semble n’avoir fait aucune concession à ses rivaux dans la course au Parlement. Aucun département n’a échappé à l’enthousiasme de M. Sonko et de ses alliés. Bien qu’il soit encore tôt pour émettre des prévisions définitives, on peut s’attendre à ce qu’au moins 100 députés se rangent derrière le Premier ministre. Si cela se concrétise, plusieurs points pourront être analysés concernant la nouvelle composition de l’Assemblée nationale.

Premièrement, Ousmane Sonko a établi sa domination sur la scène politique sénégalaise. Pour le meilleur ou pour le pire, il sera désormais impossible de prendre des décisions sans son approbation. Ce succès électoral lui offre la possibilité de choisir son avenir, qu’il s’agisse de rester à la Primature, en proie à l’incertitude d’une situation dépendant d’un décret – une éventualité que certains observateurs jugent peu probable – ou de se retirer vers la présidence de l’Assemblée, devenant ainsi la deuxième figure de l’État. Ce rôle crucial ne diminuerait en rien son influence sur le gouvernement, dont la majorité des ministres lui doivent beaucoup.

Une autre option, qui pourrait s’avérer tout aussi avantageuse, serait de nommer un de ses fidèles à la présidence de l’Assemblée, lui permettant ainsi de garder le contrôle sur les actions de « ses » députés tout en maintenant un lien physique étroit avec le Président Bassirou Diomaye Faye, dont on pense qu’il ne se limite pas à des conseils discrets, mais lui suggère des actions concrètes.

La seconde observation est que le peuple sénégalais a montré une constance et une logique dans ses choix. Malgré une campagne acharnée où les acteurs ont mis en lumière des aspects peu reluisants de la personnalité de Ousmane Sonko, les électeurs ont choisi de lui renouveler leur confiance, refuse de « lui donner la tête et de lui retirer la langue ». Cette attitude constitue une leçon précieuse.

Ses adversaires affirmaient qu’il était nécessaire de libérer le Président Faye de l’« influence néfaste de Ousmane Sonko ». En privant ce dernier d’une majorité à l’Assemblée, ils espéraient le ramener à son rôle d’opposant, qu’il semble apprécier. En plus de rétablir un équilibre institutionnel, cela aurait limité l’influence de Sonko, laissant au chef de l’État plus de latitude pour agir sans avoir à consulter son Premier ministre. Que cette stratégie soit juste ou non, elle est désormais mise à mal. Les Sénégalais ont décidé d’accorder à Ousmane Sonko les moyens d’appliquer sa politique durant les cinq prochaines années, ce qui entraîne un rapprochement durable entre Sonko et Diomaye. Ses opposants devront donc accepter de coexister avec un Sonko, toujours « prépondérant », mais non « superflu » pour ses alliés.

Une autre constatation concerne la lutte pour le leadership au sein de l’opposition, qui reste d’actualité. Les 35 % obtenus par Amadou Ba lors de la Présidentielle de mars ont été largement effacés, et la dynamique est relancée. Les tendances observées hier soir laissaient entrevoir que sa coalition Jamm ak njariñ ne parviendrait pas à se maintenir à la deuxième place derrière Pastef. Dans de nombreuses localités, elle a été fortement concurrencée par les listes de Samm sa kaddu, menées par Barthélemy Dias, et de Takku Wallu, dirigées par Macky Sall. À Fatick et dans le Fouta, Macky Sall a pris l’ascendant sur l’opposition, devançant même Pastef dans plusieurs bureaux de vote.

Cette situation conforte ceux qui pensent que Macky Sall avait pour objectif de prendre la tête d’une liste électorale concurrente à celle d’Amadou Ba afin de régler définitivement ses comptes avec son ancien Premier ministre, tout en cherchant à freiner ses ambitions politiques. Amadou Ba devra démontrer une grande agilité politique pour non seulement survivre sur la scène politique, mais aussi pour rebondir après les revers qu’il vient d’essuyer. Il doit prendre en compte que le paysage politique se renouvellera considérablement d’ici cinq ans, moment où les électeurs seront à nouveau appelés à voter.

La même observation s’applique à Barthélemy Toye Dias, maire de Dakar. Battu de manière retentissante dans son propre département, y compris dans son bureau de vote, il a une nouvelle fois souffert de l’impact de la « sonkomania ». Lors de la dernière Présidentielle, il n’avait pas réussi à soutenir son candidat, Khalifa Sall, qu’il avait dirigé en campagne, face à la marée de « Sonko mooy Diomaye ». Il pensait à tort que les électeurs, en cherchant à tourner la page Macky Sall, choisiraient un « vote utile » en écartant le leader de Taxawu Senegaal.

Cependant, il lui incombait de relever le défi, surtout que la rivalité entre Sonko et lui transcendait désormais les simples clivages politiques. Leur affrontement avait pris une tournure violente, et le fils de Jean-Paul Dias se devait de prouver qu’il n’était pas redevable à Pastef de son accession à la mairie de la capitale. Sa défaite électorale l’oblige à revoir sa stratégie politique de toute urgence, car il en va de sa survie politique.

S’il a pu se présenter aux élections malgré sa condamnation liée à la mort de Ndiaga Diouf, rien n’indique que ses anciens camarades ne chercheront pas à le faire tomber de son poste de maire. En tant que disciple de Khalifa Sall, il ne peut ignorer les mésaventures de ce dernier sous Macky Sall. L’histoire pourrait bien se répéter pour lui. Plus préoccupant, alors qu’il vise un horizon en 2029, une majorité parlementaire dominée par Pastef ne pourrait-elle pas chercher à l’éliminer de la course, mettant ainsi un terme prématuré à une carrière politique qui semblait jusqu’à présent prometteuse ?

De plus, la forte défaite des nombreuses autres listes souligne l’urgence de réformer les institutions de ce pays. Il est incompréhensible qu’avec plus de 300 partis officiellement reconnus, aucun ne soit capable de se porter seul comme candidat aux suffrages des électeurs. Même Ousmane Sonko a dû faire appel massivement à des transfuges, un groupe qu’il a toujours critiqué, pour s’assurer une victoire dans des régions où son ancrage n’était pas solide. Pire encore, avec la suspension du système de parrainage, les électeurs ont dû choisir parmi 41 listes. L’ironie est que même les mandataires dans les bureaux de vote ont reconnu qu’il était impossible de gérer 41 bulletins, et ont suggéré de ne prendre que cinq. De plus, certaines listes, en dehors des inter-coalitions, n’avaient même pas de mandataires dans certains bureaux de vote.

Parmi ces 41 listes, combien obtiendront moins de 0,5 % des voix ? Les frais qu’elles ont engagés n’ont même pas suffi à couvrir les coûts pour leur donner la parole, alors que certaines véhiculaient des idées xénophobes dangereuses pour la cohésion nationale. Il est inacceptable sur le plan moral et matériel que de telles situations continuent à se reproduire d’élection en élection. Il est grand temps de revoir le mode de sélection des candidats aux élections pour les Sénégalais. En outre, il est essentiel de se demander si les partis qui n’osent pas se présenter seuls aux élections méritent encore de solliciter le soutien de leurs concitoyens et de profiter des ressources publiques. Le parrainage, instauré par Macky Sall, bien qu’imparfait, avait l’avantage d’éviter ce type de spectacle décourageant pour une démocratie qui a besoin de se renforcer.

Redaction2023

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