Convocation de l’Assemblée nationale : Babacar Gaye défend l’indépendance des députés face à l’exécutif
La convocation de l’Assemblée nationale en session extraordinaire par Bassirou Diomaye Faye, sous l’initiative du président de la République, continue de susciter un vif débat au sein de la classe politique sénégalaise. Intervenant sur le sujet, Babacar Gaye, ancien député et expert en affaires parlementaires, a exprimé des réserves quant à l’interprétation de cette procédure, affirmant que si le président de la République a une prérogative sur l’ordre du jour, il n’en a aucune sur la convocation d’une session extraordinaire.
Dans une interview accordée à L’Observateur, Babacar Gaye a rappelé les dispositions constitutionnelles qui régissent la convocation des sessions extraordinaires. « Le président de la République n’a pas le pouvoir de convoquer une session extraordinaire de l’Assemblée nationale. L’article 63 de la Constitution, alinéa 3, est clair sur ce point : “Au cas où la session ordinaire ou une session extraordinaire est close, sans que l’Assemblée nationale n’ait fixé la date d’ouverture de sa prochaine session ordinaire, celle-ci est fixée en temps utile par le bureau de l’Assemblée nationale.” » Il ajoute que cette disposition est également reprise à l’article 4 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, précisant que seule l’Assemblée nationale, par l’intermédiaire de son bureau, peut fixer la date d’une session.
Selon Gaye, la réunion du bureau de l’Assemblée nationale tenue mercredi dernier avait déjà programmé une session extraordinaire avec un ordre du jour précis, ce qui rendrait illégitime toute autre convocation parallèle. « Le chef de l’État peut déterminer les priorités à inscrire à l’ordre du jour, mais cela ne signifie pas qu’il peut convoquer une session extraordinaire de son propre chef », a-t-il affirmé. Il a également précisé que cette priorité présidentielle n’exclut pas que d’autres points puissent être discutés lors de la session, qui ne peut excéder quinze jours et se termine une fois les questions initialement prévues épuisées.
Les prérogatives des députés : une arme face à l’exécutif
Babacar Gaye a également tenu à rappeler que l’Assemblée nationale dispose de plusieurs moyens de résister aux tentatives de l’exécutif de dicter ses priorités. « Les députés ont encore des cartes à jouer, » a-t-il assuré, soulignant qu’ils peuvent, par exemple, ouvrir une séance tout en refusant de recevoir le gouvernement, comme ce fut le cas lors du Débat d’Orientation Budgétaire (DOB). « Même pour la Déclaration de Politique Générale (DPG), il est nécessaire que l’Assemblée accepte de la recevoir », a-t-il ajouté. En d’autres termes, la majorité parlementaire peut exercer son pouvoir en conditionnant l’examen de tout texte de loi à ses propres conditions, allant jusqu’à déposer une motion de censure contre le gouvernement.